Module 6 – Table ronde 2
Peut-on encore s’informer à l’ère de l’IA ?
En avril 2024, respect éducation aux médias a organisé la seconde rencontre issue de notre cycle d’éducation aux médias « Bien S’informer et informer à l’heure des réseaux sociaux » à Lyon au sein d’H7 modérée par Charlotte Mongibeaux.
L’intelligence artificielle (IA) transforme profondément notre manière de produire, diffuser et consommer l’information. Si ces technologies offrent des opportunités sans précédent pour améliorer l’accès aux contenus, elles soulèvent également des questions cruciales sur la qualité, la fiabilité et les implications éthiques des informations que nous consommons quotidiennement.
Avec cette conférence, nous avons souhaité explorer les différents aspects de cette révolution numérique, ses avantages et ses limites, et les moyens de naviguer dans ce paysage en constante évolution avec nos invité.e.s Dorie Bruyas – directrice de l’association Fréquence écoles, Victor Fersing – fondateur du média La Fabrique Sociale, Zoé Pasquier et Myriam Hammad – fondatrices du média K7 Technosensible.
L’IA et les nouvelles dynamiques de l’information
L’IA est devenue centrale dans la manière dont les contenus sont sélectionnés et présentés. Les algorithmes des plateformes, en favorisant les contenus qui maximisent l’engagement (clics, likes), renforcent souvent les biais cognitifs des utilisateur.ice.s et créent des bulles de filtres. Ces environnements homogènes limitent la diversité des perspectives, nuisant à la richesse du débat démocratique.
En parallèle, l’IA facilite la production de contenus automatisés, tels que des articles ou vidéos générés par des outils puissants. Si ces contenus peuvent enrichir l’offre informationnelle, ils soulèvent des doutes sur leur fiabilité et exacerbent les risques liés aux deepfakes et à la manipulation de l’opinion publique.
Désinformation amplifiée : un enjeu sociétal majeur
La rapidité avec laquelle l’IA peut produire et diffuser de fausses informations rend la lutte contre la désinformation plus complexe. Des contenus émotionnels, souvent partagés massivement sur les réseaux sociaux, exploitent les biais humains et contribuent à polariser les débats.
Face à ces défis, les utilisateur.ice.s doivent être formé.e.s à analyser les intentions des contenus, à identifier les biais algorithmiques et à vérifier les faits.
Jeunes générations, réseaux sociaux et éducation aux médias
Les jeunes, grands utilisateur.ice.s de plateformes comme TikTok, sont particulièrement exposé.e.s aux effets de la personnalisation algorithmique. L’accès à des contenus courts et émotionnels peut limiter leur capacité à traiter des informations complexes.
L’éducation aux médias doit alors jouer un rôle clé en développant une littératie numérique et algorithmique, en aidant les jeunes à naviguer dans un écosystème médiatique complexe et à adopter des pratiques critiques face aux contenus qu’ils consomment.
L’IA comme alliée pour une information responsable
Malgré les risques qu’elle représente, l’IA peut également soutenir une gestion responsable de l’information. Des initiatives comme les « notes communautaires » sur certaines plateformes apportent un contexte aux contenus et favorisent une compréhension plus nuancée. De plus, des outils éducatifs basés sur l’IA, tels que les jeux sérieux ou les simulateurs d’analyse de désinformation, offrent des approches innovantes pour sensibiliser les publics.
Ethique et régulation : un équilibre à trouver
L’utilisation croissante de l’IA dans les médias soulève d’importantes questions éthiques. Les lois comme le Digital Services Act (DSA) de l’Union européenne visent à renforcer la transparence algorithmique, permettant aux utilisateurs de mieux comprendre pourquoi certains contenus leur sont proposés. En parallèle, des régulations internationales doivent garantir que l’IA soit utilisée de manière éthique, sans compromettre la diversité ni l’intégrité de l’information.
L’éducation aux médias à l’ère de l’IA
L’EMI doit évoluer pour répondre aux défis posés par l’IA. Elle doit :
• Développer des compétences critiques, permettant d’identifier les biais et de vérifier les informations.
• Promouvoir une maîtrise des algorithmes, pour comprendre les mécanismes influençant les flux de contenus.
• Sensibiliser aux dangers des contenus manipulés, tout en renforçant la résilience face à la désinformation.
Conclusion
L’IA, tout en redéfinissant la diffusion et la consommation de l’information, impose de repenser les cadres éducatifs et réglementaires. Pour qu’elle serve à renforcer la démocratie et la diversité, il est impératif de :
• Encourager la transparence des algorithmes.
• Mettre en place des régulations adaptées.
• Développer des initiatives éducatives inclusives et accessibles.
L’éducation aux médias, en particulier, constitue une pierre angulaire pour former des citoyen.ne.s capables de naviguer dans un environnement médiatique façonné par l’IA, tout en contribuant activement à une société mieux informée et plus critique.